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 le crawl de lucien /transmission

1996
le crawl de lucien / intégrale


Le crawl de lucien, créé en 1985, est dans la même veine que déserts d’amour ; si les costumes de Dominique Fabrègue en sont d’un rose embarrassant, froufrous, dentelles imperceptibles, la danse, cette fois, y joue avec son savoir-faire tout neuf. D’apparence plus aride que déserts d’amour, le crawl est aussi plus léger, déchargé des tensions profondes qui coloraient déserts. Rapide, incisive, criblée de changements de direction aigus, c’est la pièce la plus cunninghamienne de Bagouet. Déjà, pourtant, le chorégraphe commence à ironiser sur son propre style, et le rose des  costumes souligne cette conscience du maniérisme inhérent à son langage précieux, de même que la musique de Gilles Grand qui, pour être radicalement contemporaine, ne manque pas d’humour.
Les étudiants de l’ensemble chorégraphique du Conservatoire National Supérieur de Musique de Lyon, premiers à revisiter le crawl depuis la fin de la compagnie, sont familiers de l’univers de Bagouet : depuis plusieurs années ils le fréquentent, en extraits, pour des variations, ou dans l’enseignement, qui associe plusieurs des anciens danseurs de la compagnie. Et si la danse de Bagouet est, de l’avis de tous les pédagogues, profondément formatrice pour les jeunes danseurs, qui y trouvent exigence technique, richesse chorégraphique et complexité de l’interprétation, elle se nourrit, aussi, de la vitalité et de l’enthousiasme de jeunes qui ne demandent qu’à mieux s’en saisir.

isabelle ginot, programme de montpellier danse 96, 3 juillet 1996


« Dans le crawl de lucien, c’est assez simple. Il suffit de regarder les costumes – les premiers réalisés par Dominique Fabrègue à la demande de Dominique Bagouet : et selon elle, les préférés aux yeux du chorégraphe, de toute une collaboration qui ensuite ne cessa jamais. Au premier coup d’œil, ces costumes semblent tous les mêmes (rose bonbon, courte jupette pour les filles, maillots seyants pour les garçons). Après quoi on se rend compte qu’en fait, il n’y en a pas deux pareils : une échancrure ici, la découpe d’un col là, une manche, une bretelle, se font un régal impertinent, de marquer leur différence.
Toute la chorégraphie de cette pièce, créée en 1985 au festival de Montpellier (déjà), peut se résumer dans cette remarque : cette œuvre est à l’image d’une longue ligne de tension constante, un matériau parfaitement homogène, un plan absolument plat : mais cette ligne est parcourue de vibrations, le matériau fragmenté d’éclats, le plan accidenté d’infimes reliefs. C’est comme une corde qu’on pince. Comme un jeu d’échecs dont soudain les figurines s’inventeraient des trajectoires déviantes.

Quadrature

Impossible de recenser la multitude insensée des variations, des décalages et des surprises, qui font naître une sensation de liberté lyrique, et de fantaisie facétieuse, frémissant tout au long d’une composition qui sans cela semblerait un jeu de société trop bien réglé : léger affaissement, décomposition de la courbe d’un bras, joues gonflées, regard aux étoiles, nuque cassée, membre en sémaphore, pas de pingouins, ouverture en corbeille brisée, buste désajusté, main pendante sur le crâne, taille ondulée, vrille déraillée, hanche déséquilibrée, poignets en battements d’ailes…
Les difficultés sont donc considérables, dans l’interprétation de cette pièce volubile, qui requiert des qualités aussi contradictoires que rigueur et inspiration, concentration inaltérable et disponibilité sur l’instant. Il y faut de la maîtrise dans la grande portée, mais de la minutie dans le moindre détail. C’est peu de dire que les onze jeunes éléments du Conservatoire National Supérieur de Lyon y sont parvenus, de façon quasi irréprochable : homogénéité extraordinaire dans l’exécution, finesse et sensibilité dans l’interprétation.
Voilà atteinte cette synthèse entre la technique d’une part, et l’esprit d’une œuvre d’autre part, qui finissait par paraître la quadrature du cercle – jamais vraiment atteinte -, au fil des diverses reprises récentes d’œuvres de Dominique Bagouet – sauf par ses propres ex-danseurs, dans le cas bien particulier d’assaï. A l’heure de l’analyse forcenée des conditions de la transmission des chorégraphies contemporaines, cette démonstration n’est pas mince.

Le Festival n’avait programmé ce crawl qu’assez discrètement : en effet, son remontage en intégrale, par de simples élèves, n’avait pu être décidé que tardivement, et après qu’on ait vu un premier extrait décevant. Mais un festival est une manifestation de l’unique, de l’ «  ici et maintenant » : mercredi soir aux Ursulines on a éprouvé la rarissime sensation de s’approcher de l’extrême beauté. Et ce crawl de lucien, qui en son temps en avait rebuté tant et tant parmi les spectateurs, s’est attiré des acclamations d’œuvre d’exception. »

gérard mayen, midi libre, 5 juillet 1996
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