tristan
murail /musique
Né le 11 mars 1947 au Havre, Murail enfant
trouve la consonance ou les cadences parfaites de Haendel
ou Beethoven « horribles ». Ce
n'est qu'avec le « déliquescent »
Chopin qu'il finira par apprivoiser ce système
tonal dont il prétend qu'il n'est, à une
« oreille vierge de tout conditionnement »,
pas plus « agréable » qu'un
autre. A 15 ans, à Paris, Murail apprend l'orgue
avec Jean Fellot, se passionnant pour Boulez et Xenakis
que diffuse France Musique. Son père, poète
et journaliste, l'encourage à « un
vrai métier ».
Mais après sciences-éco à la Sorbonne,
l'arabe classique et maghrébin aux Langues Orientales,
et Sciences-Po, la nomination d'Olivier Messiaen au
Conservatoire va cependant changer son destin. En 1969,
couleur de mer, qu'il a composé pour un
concert à la maison de la culture du Havre, révèle
un langage sériel mais utilisé pour continuer
de répondre à une forte tentation harmonique.
Le Ligeti d'
Atmosphères et de
Lontano,
et le Xenakis architecte sonore vont alors influencer
Altitude 8000, pièce créée
par les musiciens du Conservatoire. Marquée par
un temps lisse, des processus et harmonies très
clairs, la pièce fait scandale par l'emploi d'octaves
et d'accords pentatophoniques. « Fauré
avait été remplacé par Boulez,
mais l'esprit académique était intact »
explique Murail, qui, après initiation à
l'électronique, livrera
Mémoire/Erosion,
pièce basée sur la réinjection
électronique ou feedback, voie explorée
avant lui par Stockhausen et Steve Reich. A la villa
Médicis, où Grisey, Levinas et Murail
, qui se sont rencontrés dans la classe de Messiaen
, se retrouvent, Grisey crée
Périodes,
reposant sur l'étude du spectre sonore d'un trombone.
Le « mouvement » est lancé.
Mais c'est la construction de l'Ircam en 1980 qui va
permettre aux compositeurs spectraux de passer la vitesse
supérieure, grâce à l'informaticien
David Wessel qui a échantillonné et analysé
toutes les notes des instruments joués par les
musiciens de l'Ensemble Intercontemporain. Fort de nouveaux
programmes d'assistance à la composition, permettant
de calculer le différentiel des fréquences
d'un accord en quelques secondes, Murail peut réintégrer,
avec
allégories, l'harmonie fonctionnelle
évacuée par la musique sérielle.
Dans les années 90, Murail réintroduit
l'élément mélodique dans
l'Esprit
des dunes, et retrouve logique de détente
et de tension de la musique tonale avec
le Partage
des eaux.
Tout en enseignant composition, orchestration et informatique
musicale à l'université Columbia de New
York, Murail se passionne aujourd'hui pour la psycho-acoustique,
révélant que le spectralisme intégral
de Stockhausen - appliquant dans le domaine temporel
les propositions et relations numériques de fréquences
qu'on trouve dans le spectre - est, eu égard
à la perception humaine du temps, une impasse.
Extrait de Tristan murail,
maître spectral à Marseille, article
de Eric Dahan paru dans Libération le 22 mai
2002
La suite sur :
www.tristanmurail.com